La proposition la plus importante des recommandations ESC 2024 sur la pression artérielle a été d’écrire que l’objectif de la prise en charge d’un patient ayant une pression artérielle élevée ou une hypertension artérielle était d’éviter la survenue d’une maladie cardiovasculaire, plutôt que de se fixer uniquement l’objectif d’une diminution des chiffres de la pression artérielle.
De plus les experts de l’ESC 2024 ont fait le constat qu’une approche collaborative de la prise en charge de l’hypertension artérielle, fondée sur le travail d’équipe entre médecins, infirmières, pharmaciens, diététiciens, offrait des avantages par rapport aux soins dispensés uniquement par les médecins.
En se basant sur une analyse de la littérature médicale avec un niveau de preuve probant, la recommandation ESC 2024 indique que :
A) Le vieillissement des populations à l’échelle mondiale conduit à observer une augmentation du nombre de personnes présentant une pression artérielle élevée ou une hypertension artérielle. En parallèle, les indices de performance sur la prise en charge de l’HTA – fréquence du dépistage, pourcentage de traitements prescrits et pourcentage de normalisation de la tension (contrôle tensionnel) sont médiocres sur tous les continents. Il est observé une stagnation voire une dégradation de ces indices aux USA et dans plusieurs pays d’Europe.
B) Comme le risque de maladies cardiovasculaires attribuable à la pression artérielle est continu et non pas binaire (normotension ou hypertension) et que il existe la démonstration incontestable que les médicaments hypotenseurs peuvent réduire le risque de maladies cardiovasculaires même chez les personnes qui ne sont pas traditionnellement classées comme hypertendues. Les experts de l’ESC 2024 définissent une nouvelle catégorie de sujets avec « Pression Artérielle élevée » qui correspond aux sujets ayant – mesuré en consultation – une systolique (SYS) de 120 à 139 ou une diastolique (DIA) de 70 à 89. L’hypertension artérielle (HTA) reste définie comme une pression artérielle – mesurée en consultation – supérieure ou égale à 140 pour la SYS ou 90 pour la DIA.
C) La littérature médicale probante indique sans discussion que l’observation chez un sujet d’une atteinte d’un « organe cible » (coeur et/ou vaisseaux et/ou reins) indique une hypertension sévère et/ou évoluant depuis plusieurs années sans avoir été diagnostiquée ou prise en charge de façon efficace. Cet état s’associe à un risque élevé de survenue d’une maladie cardio-vasculaire à court terme.
D) Les experts de l’ESC 2024 proposent que l’estimation du risque de survenue d’une maladie cardio-vasculaire à 10 ans soit réalisée lors de la prise en charge initiale d’un patient présentant une « Pression Artérielle élevée ». Si le risque est augmenté, les experts préconisent la mise en route d’un traitement médicamenteux ayant démontré une efficacité pour réduire le risque de survenue d’une maladie cardiovasculaires.
E) Lorsqu’un traitement anti-hypertenseur est prescrit et même si d’autres moyens sont mis en œuvre pour améliorer le profil de risque cardiovasculaire (amélioration du mode de vie alimentaire, arrêt de l’exposition aux toxiques, lutte contre la sédentarité, prescription de médicaments hypolipidémiants), l’objectif tensionnel à atteindre est de 120 à 129 pour la SYS et de 70 à 79 – mesures en consultation- pour tous les adultes, à condition que ce traitement soit bien toléré.
Plusieurs exceptions existent toutefois à cet objectif et la prise de décision individualisée est toujours la priorité la plus importante.
Enfin les experts de l’ESC 2024 ont fait le constat qu’une approche collaborative de la prise en charge de l’hypertension artérielle, fondée sur le travail d’équipe entre médecins, infirmières, pharmaciens, diététiciens et kinésithérapeutes, offrait des avantages par rapport aux soins dispensés uniquement par les médecins.
Plusieurs études probantes ont montré que les soins multidisciplinaires conçus comme une collaboration entre professionnels de santé conduisaient à une meilleure baisse de la pression artérielle systolique et diastolique.
Les études randomisées prospectives réalisées en Asie et dans certains pays anglo-saxons ont démontré que si la prescription des traitements antihypertenseurs restait une prérogative du médecin, celle-ci pouvait être aussi réalisée par d’autres professionnels de santé formés spécifiquement et associés au médecin par des accords de collaboration protocolisés et aidés d’outils numériques (plateforme de coordination, smartphone, tensiomètre connecté, application dédiée…). Ces études ont, en particulier, démontré l’amélioration de la prise en charge lorsque l’équipe comprenait des infirmières en pratique avancée, des pharmaciens ou des officiers de santé formés spécifiquement.
Lire la recommandation (en anglais)
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On ne devrait plus parler d’hypertension artérielle mais de pression artérielle élevée. Cela part d’un constat : on connaît le risque imputable à l’élévation de la pression artérielle, ce risque commence très tôt, même en dessous de 120 mm de mercure. Ces recommandations se sont réapproprié ce message : autrement dit, quand la pression artérielle commence à augmenter, le risque augmente. De facto, cela a généré une nouvelle population de sujets avec une pression artérielle élevée.
La définition de l’hypertension n’a pas changé : on est hypertendu quand la pression artérielle de consultation est supérieure à 140/90 mais entre 120 et 139 pour la systolique. Lorsque cette pression artérielle augmente, on a identifié une population de patients à risque. Il faut calculer le risque et ensuite il faut les traiter avec des objectifs plus drastiques.
L’objectif est de baisser plus bas qu’avant, non pas juste en dessous de 140/90 mais arriver entre 120 et 129 pour la systolique chez tout le monde, avec une adaptation en fonction des effets indésirables, de la fragilité ou d’autres effets indésirables liés aux médicaments.
C’est l’avènement des mesures en dehors du cabinet. Ces recommandations adoubent ce que l’on faisait déjà : la mesure ambulatoire des 24 heures mais surtout l’automesure tensionnelle. On mesure au cabinet mais il faut surtout mesurer en dehors du cabinet.
La mesure se fait selon un protocole adapté et avec des appareils adaptés. Autrement dit, tous les petits gadgets n’ont pour l’instant pas atteint le niveau de preuve nécessaire pour être validés. Mais feu vert pour les appareils adaptés, au poignet, au bras, avec un protocole adapté en dehors du cabinet.
Dès qu’on a un signal, on mesure en dehors du cabinet pour :
On la fait baisser classiquement : par la fameuse trithérapie, on essaie de commencer vite, fort, arriver à l’objectif avec un bloqueur du SRA, un inhibiteur calcique, un diurétique qu’on associe et on va chercher l’aide de la spironolactone ou, nouveauté, de l’éplérénone si on a besoin d’une quadrithérapie.
Les traitements médicamenteux et non médicamenteux
On est obnubilé par le sel quand on fait de l’hypertension, mais augmenter les apports potassiques est fondamental pour améliorer le contrôle tensionnel, directement avec des suppléments potassiques, indirectement avec des fruits et légumes. Petite astuce : quand on donne des sels de substitution, on enlève le sel et on apporte du potassium. C’est le double gain.
Message très important : pour les bêtabloquants il y a les indications cardiaques traditionnelles. L’association des bêtabloquants avec les traitements traditionnels est ok mais c’est surtout pour éviter de prescrire des bêtabloquants à des cibles jeunes qui n’en ont pas besoin. C’est pour ça qu’il y a eu ce signal. Les bêtabloquants ont leur place, en association dans les situations cardiaques électives, mais arrêtez de prescrire des bêtabloquants à des jeunes sujets de 30 ans qui sont hypertendus.
Pour l’HTA résistante, on fait au mieux, on élimine les causes secondaires, c’est toujours important, et le dosage de la rénine et de l’aldostérone a été mis en avant très tôt le plus souvent possible.
La dénervation rénale a progressé en termes de niveau de recommandations, dans des centres experts, après décisions médicales partagées, en tenant compte de la préférence patient. On peut la proposer en sus du traitement pharmacologique. Les nouvelles données concernant la dénervation permettent de l’envisager de manière plus facile.
La mesure de la pression artérielle du matin doit être effectuée avant le petit déjeuner et avant la prise de médicaments, mais pas immédiatement après le réveil.
Utiliser un appareil validé avec un brassard de taille appropriée en fonction de la circonférence du bras.
Réaliser une automesure de la tension